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JOURNAL D’UNE DAME CRÉOLE


Le voilà qui fait le joli cœur avec ses yeux pareils à des trous de crabes.)

— Au nom du Ciel ! implora Goring.

— Toi pas nommer Ciel, porte malheur, répliqua-t-elle songeuse.

— Zinga, écoute-moi, tu m’avais promis…

Elle s’écria furieuse :

— Moi zamais ai promis, tu mens, coçon !

Goring tendit les mains, l’enlaça et l’étreignit avec violence.

— Toi, lacer moi, et tout de suite, veux-tu ! veux-tu ! Moi vais craser sur toi, moi vais péter sur toi, moi vais battre, tiens ! tiens !

Et elle essayait de se dégager, le heurtait de sa croupe, lui envoyait des ruades et des coups de poings ; Goring recevait les coups et les injures, mais la tenait toujours ; Dubousquens dut s’interposer :

— Allons, viens, Zinga, laisse ce malheureux !

Hors d’haleine, la voix entrecoupée :

— Veux pas trouver sa sale figure touzou su route à moi, répétait-elle, veux pas ! moi hais lui !

— Puisqu’elle ne veut pas de vous, laissez-la donc s’en aller, dit à son tour Figeroux.

Samuel Goring avait enfin lâché sa rétive maîtresse ; il se releva, la regarda s’éloigner avec Dubousquens, et ses sanglots recommencèrent. Figeroux restait devant lui et le contemplait en haussant les épaules.

— Vous n’êtes pas un homme ! dit-il. Vous ne pourrez pas prononcer votre sermon ce soir.