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LES NUITS CHAUDES DU CAP FRANÇAIS


à lui conseiller ce meurtre. Il en chargea Figeroux.

À cet aveu tranquille, je regardai Dodue-Fleurie qui semblait aussi calme que si elle eût parlé de la pluie et du beau temps. Une pareille sérénité dans le crime m’effraya.

— Vous êtes surprise, madame, fit-elle, mais dans ce pays-ci, et surtout entre noirs et blancs, n’est-ce pas toujours la guerre ? De vous même ne dit-on pas…

— Que dit-on ? m’écriai-je, affectant un ton de colère pour cacher mon émotion.

— Rien, fit Dodue avec un sourire, mais souvenez-vous que nous sommes, que nous devons être des alliées, et vous me pardonnerez ces violences, ces crimes s’il vous plaît de les appeler ainsi. Violences ou crimes, de tels actes ne doivent pas répugner à quiconque est obligé de faire la guerre, car ils sont indispensables.

Hélas ! j’avais besoin de bonnes ou de mauvaises raisons pour calmer ma conscience, et je fus plutôt reconnaissante à Dodue-Fleurie de composer une justification qui me convenait si bien.

— Mettereau fut donc assassiné, reprit-elle, et comme vous le savez, les meurtriers ne furent pas recherchés. J’avais dès lors le gouverneur et Montouroy à ma merci, car je pouvais les accuser et eux, au contraire, n’avaient aucune preuve contre moi. Le gouverneur et Montouroy avaient trouvé dans la demeure de leur victime de quoi rétablir leur fortune,