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RELATION D’UNE ENTREVUE

amitié réciproque, et ne voulant rien faire, à ce qu’il me semble, qui fût de nature à la compromettre, consentit enfin à m’accorder cette faveur. Comme ma visite fut accompagnée de circonstances singulières et frappantes, je ne pus m’empêcher de les observer avec l’attention la plus suivie. Ces détails, où la superstition joue un si grand rôle, me feront peut-être accuser d’extravagance et d’exagération : quoi qu’il arrive, je croirois mériter des reproches, si je les passois sous silence. Ainsi, me dépouillant de tout préjugé, et m’imposant la tâche d’historien fidèle, j’espère que mon récit, quelque fastidieux qu’il puisse paroître, sera reçu avec bienveillance, et méritera l’attention des personnes à qui il est destiné, quand bien même il n’auroit d’autre utilité que d’offrir un trait remarquable du caractère national des Tibétains dans leur hommage implicite à un enfant prêtre et couronné, et les effets peu communs, je dirois presque inouis, d’une éducation précoce.

Je me justifierai peut-être encore mieux de l’avoir entrepris, en rappelant le propos très-extraordinaire que me tint le radjah de Tichou-Loumbou, quelques jours avant mon départ, et que, sans autre préambule, je vous demande la permission de rapporter littéralement.

* Introduction à l’histoire des peuples soumis à l’empire de la Chine, par M. Amiot, t. XIV, p. 131, des Mémoires concernant l’histoire, &c. des Chinois ; et vol. Ier, p. 154, du Ms. Voyez aussi ces mêmes Mémoires, tome IX, page 6.

** Voyez, ci-après, ma notea, p. 149.

*** Mémoires concernant l’histoire, &c, des Chinois, t. IX, p. 447.

    hiérarchie lamique. Ce mot signifie celui qui préside aux méditations du Ta-lai Lama, et qui fait exécuter ses ordres. Il est le premier de son conseil, et le canal par où découlent toutes les grâces que le Fo vivant accorde à ses sectateurs*. » Ajoutons qu’on lui attribue, comme au Talaï Lama [ou Grand Lama], le privilége de l’immortalité, moyennant un simple changement d’enveloppe, comme on peut s’en convaincre en lisant les relations de MM. Bogle et Turner}}, successivement ambassadeurs de la compagnie des Indes au Tibet, ainsi que les lettres que l’empereur de la Chine écrivit au sujet de la mort du Pan-tchan [ou Tichou Lama]quiavoitété le voir à Pékin**. Cette espèce de lieutenant du Grand Lama fait sa résidence à Tichou-Loumbou, ou Tchache-Loumbou, suivant l’orthographe de M. Amiot*** ; c’est une ville considérable du Tibet, peu éloignée de Lhassa, et dont on peut voir la description dans la Relation de M. Turner, (L-s.)