Page:Reclus - Étude sur les dunes, 1865.djvu/20

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quelquefois une vaine résistance. Dès que les vents réguliers de l’ouest étaient provisoirement remplacés par un vent d’est, pâtres et cultivateurs, armés de pelles et de pioches, se rendaient en toute hâte au sommet des dunes, et, pleins d’une ardeur enfantine, ils démolissaient la crête des sables pour la livrer au souffle de l’air. Mais bientôt les vents réguliers reportaient le sable vers l’intérieur ; les dunes recommençaient à marcher et mettaient l’armée des paysans en déroute. Sous peine d’être engloutis, ils devaient démolir leurs cabanes pour en emporter les matériaux, et se bâtir de nouvelles demeures à une certaine distance dans l’intérieur de la lande. Les années, les siècles s’écoulaient ; mais les dunes et les étangs marchaient toujours, et de nouveau les habitants étaient condamnés à transférer leurs villages au milieu des bruyères. C’étaient là des malheurs prévus, et la chronique gardait le silence sur ces émigrations successives : elle se borne à mentionner les noms de quelques églises qu’on a dû abandonner aux sables pour les reconstruire au loin sur le plateau des landes. Ainsi nous savons que l’église de Lége a été rebâtie en 1480 et en 1660, la première fois à 4 kilomètres, la seconde à 3 kilomètres plus avant dans l’intérieur des terres ; mais les étapes des autres localités de la même zone ne sont pas connues d’une manière précise. Quant aux bourgs aujourd’hui disparus de Lislan, de Lélos et d’Anchise, on ignore jusqu’à leur ancien emplacement. Après avoir perdu son port et ses hameaux, le bourg de Mimizan, jadis très-important, allait être englouti tout entier, lorsque, au moment suprême, les dunes furent heureusement