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GÉOGRAPHIE.

Le bassin de la Seine a 7 730 000 hectares, sur lesquels il tombe 631 millimètres de pluie par an, la moyenne de la France étant de 770. Le tout en France, moins ce que l’Oise, qui a sa source dans le Hainaut, arrose en Belgique par elle-même ou par ses premiers tributaires, faibles ruisseaux.

Or ce sol est aux trois quarts perméable, puisque sur les 7 730 000 hectares du bassin, 1 900 000 seulement appartiennent aux terres compactes.

À cette porosité la Seine doit la sagesse et la constance des rivières qu’elle unit dans son lit : leur sagesse, parce que la terre perméable est comme une éponge pour les torrents faits du déchirement des nuages du ciel ou de la fonte précipitée des neiges ; leur constance, car l’eau qu’aspire cette éponge s’amasse en lacs dans la sous-roche, sur l’argile, sur toute couche compacte ; et ces lacs, renouvelés toujours, se versent par des sources intarissables.

Aussi, dans ses crues les plus terribles, la Seine, sous les ponts de Paris, n’entraîne pas 2 000 mètres cubes par seconde, bien moins que le Gard ou l’Ardèche ou l’Erieux, courts torrents du bassin du Rhône ; pourtant elle arrive dans la vieille Lutèce avec le tribut de l’Yonne, qui rassemble les eaux de beaucoup de sols imperméables, et celui de la Marne, rivière qui a près de 500 kilomètres de longueur. La grande crue de 1876, qui a duré 55 jours et qui dans ce laps de temps a donné plus de 4 milliards de mètres cubes, n’a pas dépassé 1 660 mètres par seconde devant Paris. Peut-être la Seine ne porte-t-elle jamais 2 500 mètres par seconde à la Manche, environ le cinquième des grandes crues de la Loire, de la Garonne et du Rhône. Son débit moyen, qu’on estime à 250 mètres cubes entre les quais de Paris, est de 694, tous affluents reçus ; aux eaux basses, elle roule à Paris 75 mètres par seconde, volume qui descend quelquefois à 45, à 40, et même à 35, à la suite de sècheresses « séculaires », c’est-à-dire telles qu’il n’y en a guère d’aussi fortes que tous les siècles.