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FRANCE.

lants, de bras obstrués, de ruisseaux de plaine qui va des Ponts-de-Cé à Saint-Florent-le-Vieil ; sans parler de la rivière d’Angers, lit sans pente qui boit une partie de la crue ligérienne, puis la régurgite. Ce sont là les petits igarapés[1] d’un petit Amazone. En aval du confluent de cette rivière d’Angers, qui est la Maine, la Loire ne roule jamais beaucoup plus de 6 000 mètres cubes, moins qu’à Roanne.

Si la Loire en crue est grandiose, elle est mesquine en sécheresse : alors c’est un sable aride où coulent çà et là des ruisseaux clairs et, près du bord, un chenal régulier qu’on s’efforce de tenir navigable. La Loire, devant Orléans, peut descendre à 24 mètres cubes par seconde ; d’habitude elle roule environ 32 mètres à son entrée dans l’Orléanais. À Chalonnes, en Anjou, grâce au Cher, à l’Indre, à la Vienne, à la Maine, le volume n’est jamais inférieur à 127 mètres. À Nantes il dépasse en tout temps 700 ; mais les quais de cette grande ville ne serrent pas seulement la Loire, il y a du flot de mer dans le fleuve qu’ils bordent, et ce flot de mer retient et régularise les eaux d’amont. Le module ou portée moyenne est de 985 mètres cubes par seconde.

Donc dix fois trop d’eau ou dix fois trop peu. Pauvre fleuve que celui qui pendant quelques jours de l’année peut noyer, fouiller, disjoindre son val, et qui durant de longs mois porte à peine des byrques et n’irrigue point de prairies ! Son bassin a peu de sources puissantes en toute saison comme la Seine, et point de glaciers comme le Rhône ou même la Garonne. On a fait les études de 68 barrages qui, sur la Loire et l’Allier, pourraient retenir ensemble 520 millions de mètres cubes : assez pour verser à la Loire 60 mètres cubes de plus par seconde pendant cent jours d’eaux basses, et les crues seraient diminuées d’autant. Mais ces barrages, les dressera-t-on jamais ? Trois seulement sont faits : celui de Rochetaillée

  1. Fausses rivières, bras latéraux.