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l’homme et la terre. — inde

sont tracés par les vallées et les cols à travers les grandes montagnes de l’Asie centrale. L’aspect de la carte montre d’une manière évidente comment la colonisation aryenne racontée par le Vendidad, chapitre de l’Avesta des Iraniens, avait dû se faire, surtout du nord au sud du Paropamisus, par la grande brèche qu’emprunte la rivière de Herat, entre l’Arachosie et la Margiane. Mais des routes plus directes avaient été ménagées par la nature à l’est de ce grand corridor de communication : les divers cols de l’Hindu-kuch, qui permettent de se rendre directement des hautes vallées du bassin de l’Oxus à celles des affluents supérieurs de l’Indus, offraient trop d’avantages aux peuples migrateurs pour qu’ils ne cherchassent pas à en profiter, et, en effet, les deux versants des monts présentent, en cette région du diaphragme de l’Asie, des populations aryennes à type très caractérisé, les unes solidement groupées, les autres dispersées parmi des tribus d’autre origine.

Un de ces passages des monts, le col de Bamian, eut tant d’importance dans l’antiquité qu’on peut le considérer comme un point vital par excellence dans l’organisme de l’Ancien Monde ; en outre, il prit une valeur spéciale de ce qu’il servit de voie majeure pour établir une communication active entre les deux branches principales des nations de langue aryenne, celles qui eurent depuis des milliers d’années la plus grande initiative dans le développement humain. Pendant deux mille cinq cents ans au moins, c’est-à-dire toute la période historique antérieure à la conquête de la mer par les Portugais, et probablement aussi un nombre indéfini de siècles aux âges de la préhistoire, ce passage de Bamian, continué vers l’Indus par la vallée de Kabul et le défilé de Khaïber, fut, à l’orient de Herat, la porte presque unique suivie par les caravanes de marchands, les pèlerins, les soldats et les peuples en marche. La traversée du rideau montagneux représente pourtant une fatigue sérieuse ; depuis l’altitude de 2 000 mètres dans la haute vallée du Kabul, la distance qu’il faut parcourir pour redescendre à ce même niveau dans une des vallées affluentes de l’Oxus est de plus de 150 kilomètres ; plusieurs cols secondaires, le Hadjikak au sud, le Karakotal au nord, flanquent la brèche suprême ; mais celle-ci est relativement peu élevée puisqu’elle se trouve à 3 715 mètres d’altitude seulement, entre le 34e et le 35e parallèles, — c’est-à-dire à un millier de mètres environ au-dessous de la limite