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royaumes grecs de la bactriane

personnages parmi les dominateurs de l’Inde qui se disaient encore Hellènes se transformaient en Hindous des hautes castes par leurs
Musée du Louvre.Cl. Giraudon.
statue gréco-hindoue
habitudes, les préjugés et les mœurs. Les inscriptions des monnaies les plus anciennes étaient purement grecques ; puis elles se présentent comme des traductions de paroles iraniennes, enfin, elles deviennent bilingues, jusqu’à ce que le grec disparaisse complètement. Le costume change aussi ; le diadème des monarques grecs est remplacé par des bonnets à tête d’éléphant, levant la trompe. Le bouddhisme triomphe enfin sur les anciens dieux, quoique par lentes évolutions et sans changement brutal[1].

Si le flot des conquérants avait eu à descendre dans l’Inde par des chemins relativement faciles, comme jadis les Aryens d’Iranie, et comme plus tard les Parthons des hautes vallées afghanes, les Bactriens avaient à franchir des obstacles bien autrement redoutables. Pour se soustraire à une attaque de flanc des Parthes et autres habitants du plateau, il leur fallait traverser les multiples remparts du Paropamisus. Avant de pénétrer dans l’Inde, les Scythes, venus de par delà l’Oxus et le Jaxartes, devaient en outre franchir les seuils de partage qui séparent les versants des deux mers intérieures : d’un côté les sables de la Mongolie, de l’autre, les eaux lacustres de l’Aral. C’est un phénomène historique du plus haut intérêt que de voir une route de migration se créer de la Chine à l’Inde par l’immense détour de la

  1. Goblet d’Alviella ; Darmesteter ; Eugène Monseur, Inde et Occident, pp. 20, 21.