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l’homme et la terre. — potamie

quelles ils avaient gravé les étoiles par groupes et constellations, écrivant ainsi sur le ciel en caractères qui leur paraissaient immuables[1].

Les Chaldéens avaient inventé les signes du zodiaque ; et l’identité de formes, l’analogie des symboles qui se révèlent sans contestation possible dans tous les zodiaques des autres contrées, de l’Egypte et des pays européens aussi bien que de l’Inde, du Cambodge et de la Chine, prouvent que les observations astronomiques faites par les savants de la Chaldée constituent l’élément primitif de tous les cercles zodiacaux existant dans l’Ancien Monde. L’étude de ces documents établit aussi qu’à l’époque où furent construits les premiers zodiaques, le soleil se trouvait dans le signe du Taureau à l’équinoxe du printemps, puisque la constellation de ce nom occupait le premier rang. Or il y a 61 siècles que le soleil entra dans ce signe et 40 siècles qu’il passa dans le signe suivant : on en conclut naturellement que la ceinture symbolique avait été imaginée dans son ensemble par les Chaldéens au moins quatre mille ans avant nous : pareil travail suppose en outre que de longues périodes de préparation scientifique ont dû le précéder[2].

Les recherches de cette valeur demandaient un personnel considérable : aussi chaque cité avait-elle son observatoire et publiait-elle ses éphémérides, comme le font de nos jours les grands établissements scientifiques. Sans doute, les combinaisons d’astrologie pour la prédiction du bon ou du mauvais sort finirent-elles par entrer pour une forte part dans la besogne des observateurs, mais la science proprement dite en retirait aussi des éléments de progrès : les problèmes de géométrie trouvaient leur solution et les praticiens se hasardaient à la construction de cartes et de plans, documents vénérables dont les débris se trouvent encore dans nos musées. Pourvue de ces énormes acquisitions scientifiques, la Chaldée, semble-t-il, aurait dû conserver le privilège de fournir à l’histoire la date initiale pour la mesure des âges de l’humanité. Une de ces ères, celle de Nabonassar, d’après laquelle l’année vulgaire 1901 porterait le numéro d’ordre 2648, est du moins toujours mentionnée dans les calendriers usuels.

Les habitants de la Potamie réglaient les coupures de leur temps par douze et par sept, ainsi qu’en témoignent les mois et les semaines, mais ils connaissaient aussi la division par dix et c’est à eux, non aux Arabes,

  1. Hommel, Aufsætze und Abhandlungen.
  2. Adhémar Leclère, Revue Scientifique, 16. X, 1897, p. 481.