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journal de la commune

qui sillonnent le ciel, on aurait dit Paris assailli dans la nuit par la foudre et les éclairs.

C’était la grande attaque annoncée par M. Thiers à ses fidèles, la grande victoire de Mac-Mahon promise aux monarchistes de l’Assemblée. L’assaut du dehors devait être accompagné d’un soulèvement à l’intérieur… Mais le complot a raté, on n’a remarqué rien de particulier dans les groupes, la seule preuve que les trahisons couvent dans l’ombre, c’est que tous les endroits où se massent les gardes nationaux sont régulièrement visités par les obus.

J’étais au centre de Paris quand j’entendis la première décharge. Mon cœur battait. Ces coups de canon, ces mitrailleuses, ces feux de file et de peloton qui se succédaient sans interruption le mettaient en émoi… J’allai précipitamment vers le point qui me semblait le plus menacé, celui de Montrouge. En route, trois cavaliers m’apparaissent un instant, laissant comme une trace rouge dans l’obscurité, c’était la vision bruyante de membres de la Commune avec leurs écharpes : ils se sont fait la loi d’avoir toujours quelqu’un présent sur le lieu du danger. Je vois les citoyens travaillant dans les ténèbres à des barricades. — « Mais, rassurez-vous, citoyens, les Versaillais sont déjà repoussés… »

Mercredi, 12 avril.

Dimanche dernier était la fête de Pâques. L’Église enseigne qu’à pareil jour, il y a tantôt dix-neuf cents années, le Fils de Dieu, remontant des enfers, apporta au ciel le pardon universel, la réconciliation de toutes les offenses. — On m’affirme qu’en son discours aux fidèles, se réunissant autour de la Sainte-Table, M. Paumier, pasteur de l’Eglise réformée de Paris, ex-payée par l’Etat, a proféré les paroles suivantes :

« Maintenant que la crapule est au pouvoir… »

Mercredi, 12 avril.

Pendant que Paris réorganise péniblement la désorganisation systématique dont il lui a fallu hériter, pendant qu’il discipline ses bataillons novices, exerce ses artilleurs, cherche des officiers et des généraux et se voit obligé de