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journal de la commune

la baïonnette à Clichy que dix francs à coudre ou à varloper dans un métier. Odieuse ineptie. C’est M. Thiers qui est impitoyable parce qu’il se croit le plus fort, c’est l’Assemblée qui hurle de joie, elle flaire du sang de républicain, la chair fraîche des révolutionnaires. — Maudite soit la Commune si elle repousse une transaction raisonnable… Mais qui lui en présente ? Et ne sait-on pas que, pour se concilier comme pour se marier, il faut être deux !

Mardi, 2 mai.

« Récompense honnête à qui donnera l’adresse d’un fonctionnaire républicain dans le Gard ».

Cette annonce se lit dans un journal du département du Gard. N’oublions pas, je vous prie que M. Thiers est le champion de la République contre Paris.

Que ne donnerait Versailles pour imposer quarantaine à tout ce qui sort du Paris pestiféré ! Les lettres sont arrêtées, les journaux confisqués, mais les hommes, combien plus doivent-ils être suspects ! De peur que des communards n’infestent la province, de peur surtout qu’ils n’échappent à la vengeance des Versaillais en se réfugiant dans les pays voisins sous des passeports étrangers, le Gouvernement a posté à Pontoise, Amiens, le Havre, Calais, Cherbourg, aux villes frontières des agents allemands, italiens, russes, anglais, chargés d’examiner les laissez passer et de questionner les voyageurs. Au moindre doute, pour une prononciation fautive, un accent suspect, on arrête les individus. Les trains même entre deux stations font un temps d’arrêt pour livrer les émigrants à la complète disposition des policiers.

Je lis dans un journal anglais que le Ministre Belge comte d’Anethan… d’Anethan… d’Anethan…, ce nom ne m’est pas inconnu… Ah ! oui, c’est celui d’un personnage compromis dans les voleries cléricales et boursicotières des Laugrand-Dumoncel et Cie a promis à M. Thiers et à son Ministre des Affaires Étrangères, M. Jules Favre que la Belgique, souricière hospitalière, recevrait les fugitifs de Paris dans les bras de ses gendarmes qui remettraient ensuite leurs hôtes aux soins de la prévôté de Versailles.

J’ai lu en fronçant les narines de dégoût.