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journal de la commune

Et c’est sur cet espoir de ne pas être châtiés suivant l’énormité de nos crimes, espoir fondé sur la véracité de M. Thiers seulement et non sur un engagement de l’Assemblée, que M. Schoelcher sollicite les Parisiens de s’enrôler dans une immense conspiration afin de contraindre la Commune à mettre bas les armes. Comment pourriez-vous hésiter puisque M. Thiers a promis de pardonner tout à tout le monde, sauf aux assassins des deux généraux… Notez que ce langage, qu’on croit conciliant, nous exaspère. Nous combattons pour le Droit, nous avons fait à la Justice le sacrifice de notre vie ; — et arrive le républicain Schoelcher, flanquant le cruel et goguenard meneur de la rue de Poitiers : « Nous vous ferons grâce, sauf aux assassins parmi vous ! »

M. Schoelcher dit très bien : « Quel que soit le vainqueur, c’est la République qui est perdue. On se massacre entre deux impasses. Tant de batailles, où depuis vingt jours les Français s’acharnent à se tuer, ne peuvent avoir de fin heureuse, ni d’un côté ni de l’autre… » Si de part et d’autre, on se fait une guerre à outrance, à qui la faute ? — « À la Commune, répond M. Schoelcher sans sourciller, il faut donc faire pression sur elle pour qu’elle se démette. Et M. Schoelcher ne se retourne pas au moins vers les villes de France pour leur dire : « Faites pression, contraignez l’Assemblée à faire la paix. »

Et cependant les villes de France y seraient disposées. L’autre jour Mâcon adjurait nos députés de se mettre à la tête d’une croisade de conciliation. Les représentants de Paris ont répondu vaguement par un long discours qui ne dit rien, par une douche d’eau tiède. Comment les villes de province interviendraient-elles en faveur de Paris, si ses propres représentants n’ont pas eux-mêmes cette initiative. Il faut qu’il soit souillé de crimes bien noirs le criminel pour lequel ses avocats eux-mêmes n’osent pas prendre la parole ! Quel silence accusateur !

Dès que le feu a été ouvert contre Paris, nous eussions voulu qu’ils se retirassent. Ils ne l’ont pas fait. C’est, pensons-nous un accroc fait à notre dignité et à la leur. — Ils se sont résignés sans doute à un dur sacrifice, en prévision des immenses services qu’ils pourront nous rendre. — Ces services, quels sont-il ? Ils n’ont rien fait pour nous, et,