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journal de la commune

guant nos plans, et, par contre, en donnant de faux renseignements, en encourageant les ennemis du dehors et du dedans, en racontant un tas de billevesées sur notre compte que nos amis eux-mêmes s’empressent de croire ».

— « S’il en est ainsi, ce qu’il y aurait à mon sens de moins mauvais, c’est que la Commune tout entière se ralliât à la proposition radicale du citoyen Amouroux. « En temps de guerre, a t-il dit, tous les journaux doivent être supprimés, un seul excepté, l’Officiel. »

— « Vous n’y avez pas plus réfléchi qu’Amouroux. L’Officiel est fatalement l’Officiel, c’est-à-dire un journal sec, rebutant, gourmé, ne donnant que des faits aussi exacts que possible, c’est-à-dire de vieux faits, rances, insipides, incolores. Quant à donner les faits actuels avec l’exactitude d’un procès-verbal, quant à raconter nos fautes passées et celles que nous allons commettre, autant voudrait engager les généraux de Versailles à assister à nos Conseils de guerre. L’Officiel ne doit contenir que des comptes rendus administratifs, nos affiches, décrets et proclamations : pour tout le reste il doit être insignifiant. En dehors de lui, nous avons besoin de journaux pour stimuler le zèle de la population, pour lui donner du cœur au ventre, car la Commune est perdue si elle n’est soutenue par l’enthousiasme et la passion de ses défenseurs. »

— « En ce cas, les amis font de la piètre besogne. Je vous assure que le plus perfide journal de nos ennemis nous fait un moindre mal que le moins sot journal de nos amis. Et l’ami médiocre ne nous fait ni plus de bien ni plus de mal qu’un ennemi médiocre. Si, de toute nécessité, il me fallait donc prendre une mesure d’exception relativement à la presse, le décret que je croirais de tous le moins funeste serait celui-ci : « Les amis se tairont : quand aux ennemis, qu’ils continuent à parler, si ça leur plaît ».

— « On voit bien que vous n’avez pas la malchance d’être Préfet de Police Lisez le projet que de ce pas j’apporte au Moniteur.

« Sont supprimés le Moniteur Universel, le Spectateur, l’Observateur, l’Univers, l’Etoile et l’Anonyme. »

Cet entretien me laissa sous une impression quasi pénible, et la conscience mal à l’aise, comme dans toutes les circonstances où le Droit est en lutte avec la Nécessité, lorsque