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journal de la commune

mait » Le paysan est devenu lâche, car il est devenu conservateur, et conservateur parce qu’il est enrichi ; néanmoins il est chauvin et même patriote en ses bons moments ; il eût été de bon cœur, peut-être, à une guerre sérieuse, mais dès qu’il comprit comment après avoir été si mal emmanchée, elle était si mal menée, il n’eut plus qu’un cri, qu’une passion : arrêtons les frais. La paix, la paix, coûte que coûte !

Les conservateurs qui voulaient la paix quand même ont soigneusement expliqué aux sept millions et demi de plébiscitaires que les républicains seuls étaient responsables de la prolongation de la guerre. De plus les élections se firent sous une pression manifestement et odieusement antirépublicaine, par le fait des Favre, des Picard et des Simon, agissant eux-mêmes contre Gambetta sous la pression des menaces prussiennes. — Et voilà comment fut élue par le plébiscitaire insensé la Chambre la plus sotte, la plus lâche et la plus cruelle qui ait jamais souillé de son nom les annales parlementaires. Cette Chambre, qui ne représente pas le pays mais la passion d’un moment, un instant de crise, je crois qu’on peut le dire à la décharge de la France, est légitimiste dans sa grande majorité, orléaniste par le tréfonds — elle n’est républicaine — couci-couci — que par le fait des votes de Paris et des grandes villes.

L’Assemblée rurale attendit à peine la signature des préliminaires de paix avec la Prusse pour déclarer la guerre à Paris républicain, foyer de révolutions. Thiers, son complaisant et son complice, manigança le coup d’État du 18 mars ; et, parce qu’il n’a pas réussi, Paris est canonné, bombardé. — Toutes les forces disponibles de la France sont engagées pour écraser Paris ; la France fait un effort plus terrible pour massacrer Paris dans un duel à mort qu’elle n’a fait d’efforts après Sedan pour se défendre contre les Prussiens. C’est parce que les libéraux n’ont pas voulu de l’alliance des républicains pour la guerre à outrance contre l’étranger, qu’alliés à l’étranger, ils font maintenant aux républicains de Paris une guerre à outrance.

Toute la féroce énergie que la France met à se suicider hélas ! elle eût pu l’employer à se défendre ! Du poignard qu’elle n’avait pas osé brandir contre la Prusse, elle se fouille maintenant le ventre et la poitrine… Prusse, que tu