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journal de la commune

mille accidents de la guerre, ne parviennent pas à repousser les hordes envahissantes, la ville est massacrée, la Révolution est perdue et le monde est livré aux horreurs d’une réaction dont on ne peut prévoir le terme.

Dimanche 21 mai.

Il est certain que si Paris peut tenir quelque temps encore, il lui viendra des secours. Contre Versailles altérée du sang de Paris, la protestation de la province indignée se fait de jour en jour plus haute et plus forte, la protestation se fait menaçante et impérative. Si cela dure encore, la province républicaine tiendra totalement la même conduite que la franc maçonnerie parisienne, qui a été entraînée dans la mêlée et qui, après avoir planté son drapeau de paix entre les combattants, a dû tirer le glaive pour le défendre contre les assaillants qui le mettaient en pièces.

Malgré l’interdiction violente par M. Thiers du Congrès de Bordeaux assises du communisme et de la rébellion, malgré les fureurs de M. Picard, et du Grand-Justicier Dufaure, le patron de tous les bourreaux de France, le mouvement des conseils municipaux s’interposant entre Paris et Versailles n’a pas discontinué un seul jour. Le lendemain même de la note comminatoire de l’Officiel, les délégués des conseils municipaux du département de l’Hérault, au nombre de treize, se sont mis en route pour Versailles, porteurs des pétitions de 150 villes et communes, réclamant la reconnaissance de la République par l’Assemblée et la cessation de la guerre. — Sur le chemin, ils rencontrent un général, le vaillant M. de Curtin, qui, à la tête de 300 soldats les attendait à une station. Les treize citoyens furent facilement arrêtés, emballés dans un train spécial, accompagnés de gendarmes, revolver au poing. Ils furent dans cet appareil conduits à Nevers, et incarcérés dans la prison cellulaire. Pendant trois jours les représentants de l’Hérault restèrent sous les verrous, sans être même interrogés. Puis, sans aucune explication, le Directeur de la prison leur annonça leur mise en liberté et, le registre d’écrou signé, il leur ouvrit les portes. Les citoyens reprirent bravement leur voyage, et, arrivés à Versailles, allèrent tout droit sonner chez M. Thiers. Le chef du pouvoir exécutif leur fit