Page:Regnard - Œuvres complètes, tome quatrième, 1820.djvu/334

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Léandre

Ah ! Que cette crainte m’offense !

Isabelle

Pourquoi vous offenser de la juste frayeur
Dont je sens les atteintes ?
Les troubles et les craintes
Sont les premiers effets d’une naissante ardeur.

Léandre

De ce tendre discours que mon âme est ravie !

Isabelle

D’un jaloux odieux je crains la barbarie :
Si notre amour éclatoit à ses yeux,
Rien ne pourroit calmer ses transports furieux.

Léandre

L’Amour, armé de la constance,
Me craint ni rivaux, ni jaloux ;
Si nos cœurs sont d’intelligence,
Rien n’est à redouter pour nous.
D’un jaloux importun tromper la vigilance,
C’est goûter par avance
Ce que l’amour a de plus doux.

Isabelle

Brûlerez-vous pour moi d’une flamme sincère ?

Léandre

Pouvez-vous vous connoître, et me le demander ?

Isabelle

La conquête d’un cœur est plus aisée à faire
Qu’elle n’est facile à garder.

Léandre