Page:Regnard - Œuvres complètes, tome troisième, 1820.djvu/63

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Faire bien le jaloux, et vouloir se défaire ;
Commander à ses pleurs de sortir au besoin ;
Être un jour sans manger, bouder seul en un coin ;
Redoubler quelquefois de tendresses nouvelles.
Lorsque l’on sait jouer ce rôle auprès des belles,
On est bien malheureux et bien disgracié,
Quand on manque, à la fin, d’en tirer aile ou pied.

cléanthis.

La nature, en naissant, vous fit l’âme sensible.

strabon.

Le soufre préparé n’est pas plus combustible.

cléanthis.

Ainsi donc votre cœur s’est souvent enflammé ?
Vous aimiez autrefois ?

strabon.

Vous aimiez autrefois ? Non, mais j’étois aimé.
Je me suis signalé par plus d’une victoire.
Mais si de vous aimer vous m’accordiez la gloire,
Vous verriez tout mon cœur, par des soins éternels,
Faire fumer l’encens au pied de vos autels.

cléanthis.

Mon bonheur seroit pur, et ma gloire trop grande,
De recevoir ici vos vœux et votre offrande ;
Mais certaine raison, qui murmure en mon cœur,
M’empêche de répondre à toute votre ardeur.

strabon.

À mes désirs aussi j’en ai quelqu’un contraire[1]

  1. Ce vers est conforme à l’édition originale, à celle de 1728, et à celle de 1750 ; et il paroît que c’est ainsi que l’auteur l’a fait. Comme on a vu un solécisme dans ce vers, le pronom quelqu’un devant se rapporter à raison, on a refait ainsi ce vers :
    J’en ai quelqu’une aussi qui me seroit contraire.
    Changement pour changement, on auroit pu préférer celui-ci :
    À mes désirs aussi j’en ai quelque contraire.