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comme précédemment. Si je n’avais pu introduire ma baguette, il m’aurait fallu percer un trou près de l’extrémité du tonneau et procéder comme je l’avais déjà fait pour obtenir le grand diamètre.

Restait maintenant à déterminer la longueur du tonneau. Si simple que cela paraisse, j’eus beaucoup de peine à l’obtenir avec exactitude. Je n’avais, pensez-vous, qu’à tenir ma baguette parallèlement à la futaille et à l’entailler vis-à-vis les extrémités de celle-ci. C’est sans doute très facile quand on y voit clair ; mais, dans l’obscurité profonde où j’étais, le toucher seul me permettait d’établir la correspondance entre le bout de ma baguette et celui du tonneau, et encore sans aucune précision ; en raison de la distance qui les séparait, mes doigts ne réussissaient pas à les atteindre en même temps et devaient passer alternativement de l’un à l’autre. Autre cause d’erreur : je ne parvenais pas, malgré tous mes efforts, à maintenir ma baguette immobile. Ce procédé finit donc par me paraître impraticable, et je restai quelque temps dans un sérieux embarras. Je me trouvais en face d’une difficulté tout à fait imprévue, car, si dès le principe j’avais considéré la recherche des diamètres comme assez difficile, celle de la longueur ne m’avait nullement préoccupé.

Enfin la réflexion me suggéra un plan qui devait me permettre d’atteindre mon but. Je n’avais qu’à me faire une autre baguette en fixant bout à bout deux nouvelles longueurs taillées dans ma planche de sapin.

J’appliquai alors ma première baguette horizontalement à l’extrémité du tonneau dont elle dépassait le bord d’un pied environ de chaque côté. Je plaçai ensuite ma seconde baguette dans une direction également horizontale, le bout appuyé contre la partie saillante, de façon à former avec elle un angle droit. Je fis alors une coche à l’endroit où elle arrivait en contact avec le point le plus renflé du tonneau, c’est-à-dire avec le milieu ; puis, déduisant de cette mesure la hauteur du rebord et l’épaisseur du fond, j’obtins la moitié de la longueur intérieure de ma futaille, ce qui me suffisait, puisque deux demies font un entier.

Maintenant fous les éléments du problème étaient en ma possession ; il ne me restait plus qu’à en chercher la solution.


CHAPITRE XI
QUOD ERAT FACIENDUM


Il m’était assez facile de déterminer la capacité de mon tonneau en pieds cubes et de réduire ensuite ceux-ci en gallons. Je savais assez d’arithmétique pour faire ce calcul, quoique je n’eusse à ma disposition ni papier, ni plume, ni ardoise, ni crayon. J’en aurais eu, d’ailleurs, que l’obscurité ne me permettait pas de les utiliser ; mais je n’en avais pas besoin. Je m’étais souvent exercé à compter de tête, si bien que je pouvais additionner, soustraire, multiplier ou diviser des nombres composés de beaucoup de chiffres sans le secours d’une plume ou d’un crayon. Le problème que j’avais à résoudre ne présentant que peu de chiffres, la solution m’en paraissait fort aisée.

Il me fallait, toutefois, vaincre une difficulté préliminaire. J’avais bien mesuré la longueur et les deux diamètres de ma futaille avec des baguettes et indiqué sur celles-ci, par des coches, les dimensions trouvées ; mais je ne pouvais supputer en pieds et pouces la distance qui séparait ces coches les unes des autres ou de l’extrémité des ba-