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MES SOUVENIRS

faire la paix, il pourrait y consentir, mais qu’il ne consentirait jamais à les lui payer ! M. Ravina, conseiller d’État, homme estimé pour sa conduite privée et sa science comme légiste, mais qui, livré à l’enivrement de sa parole, perdait la tête, se laissa aller à des emportements incroyables. Il passa en revue les campagnes de 1848 et 1849, déclara que la nation trahie par l’aristocratie ne pouvait solder le prix de cette trahison, et que la Chambre ne pouvait se rendre complice de ce résultat en approuvant une paix déshonorante et ruineuse.

« L’ennemi n’a pas vaincu avec les armes des braves, mais avec celle des Judas ! » s’écriait-il, et sur ces extravagances il fut nommé rapporteur de la commission. Toutes les considérations d’intérêt public étaient étouffées par le désir de faire applaudir un italianisme emphatique exprimé dans le plus mauvais italien possible.

On imagina alors un moyen terme : celui d’accorder au ministère un crédit de 75 millions pour les besoins de l’état, sans parler de la paix, mais la demande d’urgence fut refusée et le projet fut renvoyé aux bureaux. Le mauvais vouloir de le Chambre et les lenteurs parlementaires mettaient le ministère dans un embarras extrême vis-à-vis de l’Autriche, qui, heureusement, n’en abusa pas et qui fit