Page:René Crevel La Mort Difficile 1926 Simon Kra Editeur.djvu/182

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Ils sont roulés par un invisible courant, le suivent dans ses moindres caprices, et, tout à coup se reprenant, couple uni contre les éléments, les créatures et la musique, ce filet qui risque de se faire piège, ils se redressent, piétinent les tentations folles, et, dans une marche, dont chaque pas pourrait se compter par des menaces, semblent passer une revue de leurs invisibles mais sûrs alliés. La Roumano-Scandinave aspire de tout son nez, de toute sa poitrine comme un belluaire qui ne veut rien perdre de l’odeur de ses fauves. Bruggle, de temps à autre, ferme les yeux, pour avoir la surprise de retrouver les danseurs, juchés au sommet périlleux de la phrase musicale. Pierre est blanc, il écoute son voisin Lucas qui chuchote : « Ils me font rire avec leur adoration des voyous. Vous avez entendu notre Roumano-Scandinave nous déclarer qu’Armand avait été surnommé l’Éventré, parce qu’il avait reçu un coup de couteau aux environs du nombril. Détrompez-vous, ledit Armand, tout à l’heure m’a avoué lui-même qu’on l’appelait l’Éventré, parce qu’il avait été opéré de l’appendicite, que sa plaie s’était mal refermée et qu’il avait de ce fait, une très grande cicatrice. Je ne comprends rien à leur goût des faubourgs et des boîtes de tantes de cinquantième ordre.

— Je sais, je sais répond Pierre qui vient de saisir un regard d’Arthur à Totor.

Il sait…