Page:René de Pont-Jest - La Duchesse Claude.djvu/205

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Sa maison, remarquablement tenue, sans luxe criard, n’était ouverte qu’à des hommes honorables, sinon célèbres tout au moins connus dans les arts et les lettres. Elle protégeait avec délicatesse les débuts des peintres et des sculpteurs qui lui étaient signalés, en faisant acheter leurs œuvres par Berquelier, tout fier de jouer au Mécène. Bientôt elle eut ainsi une galerie fort intéressante.

À sa table, exquise, bien servie, où le digne Auvergnat avait l’esprit de ne pas s’asseoir en maître, elle ne donnait place qu’à des convives spirituels, gourmets, choisis avec soin, et enfin, si elle ne gardait peut-être pas à son généreux protecteur, sur les yeux duquel existait du reste le plus épais bandeau, une fidélité absolue, elle avait du moins le bon goût de ne pas le rendre ridicule, se conduisant au contraire de façon à ce que ses commensaux l’entourassent d’égards et de respect.

Le grand industriel, qui n’était pas un sot, sentait parfaitement ce que sa jolie compagne faisait pour son bonheur, et il lui en témoignait sa reconnaissance, d’abord en l’adorant chaque jour davantage et ensuite en s’occupant incessamment d’augmenter sa fortune.

De plus, comme sans lui rien dire de la terrible et honteuse page de sa jeunesse, Geneviève lui avait cependant avoué, dès le commencement de leur liaison, qu’elle était mère, il avait tout tenté pour la décider à faire venir sa fille auprès d’elle, mais il avait échoué.

« Jamais Claude n’entrera chez moi, à Paris », avait toujours répondu avec une grande fermeté et une sorte d’indignation Mme Frémerol, toutes les fois que son ami était revenu sur ce sujet.