Page:René de Pont-Jest - La Duchesse Claude.djvu/254

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ciel fût couvert, lorsque le quatrième jour de son départ, au moment où le soleil descendait, la brise qui venait de terre sauta tout à coup et se mit à souffler du nord avec violence.

— Vais-je donc échouer au port ? se demanda Jean avec terreur, en voyant la mer grossir et l’horizon devenir menaçant.

Bientôt, en effet, rapidement, comme cela se produit dans les zones tropicales, l’orage gronda, les vagues s’élevèrent et la pirogue, que Mourel ne pouvait songer à soutenir avec sa voile, fut à la merci des flots.

Lorsqu’elle montait sur la crête des lames, il apercevait la côte, vers laquelle le vent et le courant le poussaient, puis, au-delà du sable et des récifs, il distinguait des constructions diverses dont il ne pouvait reconnaître la nature, car la nuit commençait à se faire.

Avait-il dépassé le Corentin qui sépare la Guyane hollandaise de la Guyane anglaise ? Il l’ignorait.

Était-ce la terre d’asile qui se dressait devant lui, ou était-ce au bagne que le rejetaient les éléments déchaînés ? Il n’en savait rien.

Mais ce qu’il comprenait, c’est que la lutte était impossible et qu’il devait se soumettre, qu’il allât à la mort ou à la liberté !

Néanmoins, avec une énergie suprême, il s’efforçait de se tenir debout à la lame, pour arriver au rivage dans les moins mauvaises conditions possibles, quand, soudain, une vague énorme souleva la pirogue, l’entraîna sur son sommet et, déferlant sur la rive, la lança au loin, brisée, en même temps que Jean, meur-