Page:René de Pont-Jest - Le Fire-Fly.djvu/104

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pouvait seul faire atteindre à lui et sa famille, il se décida un beau jour à mettre son projet à exécution. La triste perspective de mourir de faim en chemin ou d’être dévoré par les tigres ne l’arrêta pas un instant. Laissant là sa femme, ses enfants ; engageant ses bijoux, ses biens ; s’appauvrissant enfin pour le reste de ses jours, s’il devait toutefois survivre à son pèlerinage, il partit. Pendant plus de deux années, personne ne reçut de ses nouvelles. Après avoir échappé à tous les dangers, après avoir résisté à toutes les souffrances, il revint un beau jour pour être l’objet de la vénération de chacun, et pour voir la caste des tschatryas, c’est-à-dire celle qui vient immédiatement après celle des brahmines, s’ouvrir à lui et à sa famille.

Pendant son voyage, il est vrai, sa femme et ses enfants étaient morts de misère, sa maison avait été saisie par le fisc, sa famille s’était dispersée ; mais le pèlerinage s’était accompli et un vaischyas avait mérité de devenir tschatryas. Il ne lui restait qu’à louer Brahma.

Que Brahma soit loué !

Nous avions fait élection de domicile dans un hôtel assez présentable tenu par un juif, ainsi que presque tous les hôtels de l’Inde.

Une heure après notre arrivée, nous étions déjà en train de parcourir la ville. La nuit commençant à venir, la population tout entière était dans les rues.