Page:René de Pont-Jest - Le Fire-Fly.djvu/218

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lourde et blanche, s’étendant depuis les bouches du Gange jusque bien loin en pleine mer, qui a donné aux poètes, sectateurs de Brahma, l’idée de la mer de lait caillé, de la Taïr, de la mythologie indienne.

Vers midi, néanmoins, nous pûmes distinguer à l’œil nu les sables de Saugor et son phare entouré de palissades destinées à défendre son gardien des tigres dont l’île est infestée ; mais bientôt les courants devinrent si rapides qu’à deux heures nous n’étions encore que par le travers du feu flottant du chenal de l’est. À la fin de la journée, seulement, nous pûmes gagner le mouillage.

À l’époque dont je parle, il n’y avait pas les remorqueurs qui viennent aujourd’hui prendre les navires à l’embouchure du Hougli. On était obligé de ne remonter le fleuve qu’à chaque marée montante, et de se servir des bateaux de toue qui ne faisaient pas de service de nuit.

Ces bateaux de toue vinrent nous prendre au point du jour suivant. C’étaient de longues pirogues plates, armées de seize à vingt avirons que maniaient vigoureusement de solides Bengalis nus, sauf le pagne à la ceinture. Ils nous amenèrent un pilote, espèce d’Anglais blond et fade qui, à peine à bord, prit le commandement du Raimbow et donna l’ordre d’appareiller. Il fallait profiter de la marée montante.

Nous mouillâmes le soir à l’embouchure de la rivière de Tamlouck. Le lendemain avant la nuit,