Page:René de Pont-Jest - Le Fire-Fly.djvu/420

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petit promontoire de sable s’avançant de huit à dix pieds dans la mer et complètement entouré des trois autres côtés par les hautes falaises du rivage ; falaises dont les flots, dans leurs colères, avaient fouillé le pied, et qui présentaient çà et là de larges crevasses et des rochers, semblant, sous les efforts du vent, prêts à se détacher de la montagne de granit pour nous écraser sous leur poids. La nuit s’était faite tantôt claire, tantôt sombre, ainsi que cela arrive dans les temps à grains. Par instants, de gros nuages noirs jetaient autour de nous d’épaisses ombres ; par moments, au contraire, le ciel, resplendissant d’étoiles, se déroulait dans toute sa splendeur au dessus de nos têtes. Il nous sembla à plusieurs reprises distinguer, à deux milles de nous à peine, la mâture du Fire-Fly se balançant sur la lame.

Soudain, au milieu des mugissements des vagues qui se brisaient à nos pieds et qui nous couvraient, d’écume, nous crûmes entendre des coups de fusil. Le même sentiment d’effroi s’empara de chacun de nous, car, en même temps que nous prêtions attentivement l’oreille, nos regards se rencontrèrent.

La mousqueterie se fit bientôt plus rapide, plus précipitée ; puis un bruit sec, éclatant, précédé d’éclairs qui traversaient l’espace, vint la dominer par intervalles. Le doute ne nous était plus permis. Le Fire-Fly se défendait contre une attaque des pirates ou des bateaux mandarins, et nous ne pouvions retourner à bord.