Page:René de Pont-Jest - Le Procès des Thugs.djvu/555

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— Soyez demain soir à la nécropole des radjahs, devant le mausolée de Sardjad-je ; le Maître enverra au-devant de vous.

À cette nouvelle, le cœur du capitaine se gonfla d’une joie immense ; l’heure de la vengeance était donc enfin venue, car il n’en pouvait douter : c’était bien Nadir qui attendrait là sa fiancée.

Nous savons que George Wesley ne se trompait pas et que c’était en effet à la nécropole des anciens radjahs de Tanjore que le mari d’Ada Maury avait donné rendez-vous à la fille de Romanshee.

Décidé à ne rien négliger pour que son ennemi ne pût lui échapper, le capitaine courut chez le gouverneur de Tritchinapaly et le pria de mettre sous ses ordres une demi-douzaine de soldats anglais.

Le gouverneur lui accorda immédiatement ce renfort qui pouvait être utile pour le cas où Nadir serait accompagné de quelques-uns de ces hommes qui lui étaient dévoués jusqu’à la mort, et le lendemain matin, après s’être assuré que Nanda était déjà parti, George Wesley prit la route de Tanjore.

Il avait envoyé Kalisha en avant pour surveiller le brahmine, et vers six heures du soir, lorsque le capitaine atteignit les premiers mausolées de la nécropole, l’Hindou vint l’avertir que le prêtre et la jeune femme venaient de disparaître, entraînés par deux hommes qui guettaient leur arrivée, dans l’intérieur d’une case construite à quelques pas plus loin, sur le bord de la route.

Profitant de la nuit qui commençait à tomber, l’officier anglais se dirigea avec ses soldats vers la demeure isolée que lui désignait Kalisha.

Bientôt il l’atteignit.

C’était une hutte grossièrement construite, sans doute par quelques-uns des pillards de la nécropole ; et ses habitants l’avaient entourée d’une solide palissade pour se défendre contre l’attaque des bêtes fauves.

Le capitaine George posta ses hommes aux angles de cette espèce de redoute avec ordre de n’en laisser sortir personne, et, accompagné de Stilson, il s’approcha à pas de loup de la solution de continuité qui semblait en être la porte.

Pénétrons dans la case, pour assister à la scène tout à la fois bizarre et touchante dont elle était le théâtre.

Conduite par Nanda, Sita avait retrouvé là Nadir et elle s’était jetée dans ses bras en s’écriant :

— Que Wischnou soit loué, mon fiancé m’est enfin rendu !

L’Hindou avait reçu la jeune femme sur son cœur, et il répondait à son étreinte avec une émotion visible, mais émotion qui était faite de plus de tendresse que d’amour.

Ada n’aurait pu être jalouse.