Page:René de Pont-Jest - Sang-Maudit.djvu/344

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

main de maintenir en arrière les bras de sa victime pendant que, de l’autre, il attirait sa tête à lui.

À ce moment, on frappa à la porte.

— Que le diable soit de l’importun ! s’écria Marius en abandonnant la lutte. Entrez !

C’était Philidor.

Malgré son respect pour son patron et son ignorance du mal, l’honnête garçon comprit d’un seul coup d’œil ce qui se passait. D’ailleurs les larmes de Marie exprimaient assez sa honte et son indignation.

Pâle et tremblant, le pauvre clerc réussit cependant à dire avec calme :

— Pardon, monsieur, mais il s’agit d’une affaire importante et j’ai cru devoir vous prévenir que deux clients vous demandent.

— C’est bien, j’y vais ; priez-les d’attendre un peu.

Pour réparer le désordre de sa toilette et peut-être aussi pour avoir le temps de se remettre un peu, Pergous passa dans sa chambre à coucher.

Philidor était resté debout, immobile, sur le seuil de la salle à manger, les yeux, fixés sur Marie qui pleurait toujours.

Craignant que son maître ne rentrât et ne les surprît tous deux, l’employé fit un mouvement pour s’éloigner.

Mais la jeune fille se rapprocha vivement du brave garçon et lui dit à voix basse :

— Il faut que je vous parle !

— Le patron va sans doute sortir avec les personnes qui l’attendent dans son cabinet, répondit-il ; j’enverrai le petit clerc en course ; venez me retrouver.

Et, tout ému par avance de l’entretien qu’il allait avoir avec celle qu’il aimait sans oser le lui dire, il retourna à ses dossiers.

Quelques instants après, l’ex-avoué prévenait son secrétaire qu’il s’absentait pour une heure au moins, et, aussitôt après son départ, le gamin servant de saute-ruisseau était envoyé en course par Philidor.

Marie, qui était sans doute aux aguets, entra presque immédiatement dans le bureau où son discret amoureux l’attendait.

— Mon ami, lui dit-elle en lui tendant la main, vous m’avez offert votre appui, je viens vous le rappeler.

— Je crains de comprendre, mademoiselle, répondit le brave garçon en réprimant un geste de colère. C’est donc vrai, ce que j’ai cru deviner ? M. Pergous…

— Ses façons de faire m’épouvantent, je tremble dès que je suis seule avec lui, et, bien que je m’enferme le soir dans ma chambre, j’ose à peine m’endormir. Tant