Page:René de Pont-Jest - Sang-Maudit.djvu/367

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Ce fut M. Gilbert qui prit la parole, mais aux premiers mots de conciliation et d’excuses à recevoir, MM. du Charmil et de Fressantel se récrièrent.

— Rien de semblable n’est plus possible, messieurs, dit M. de Fressantel ; M. de Platen nous désavouerait.

— Je ne le crois pas, fit sèchement M. Gilbert, car, nous le savons par une personne des plus honorables, qu’il est inutile de nommer, votre ami, dont la bravoure n’est pas plus contestable que celle de M. de Ferney, comprend que celui-ci, induit en erreur, a été poussé par un accès de colère qu’il regrette sincèrement.

— Enfin, messieurs, nous allons faire part de vos propositions à M. de Platen, mais nous doutons fort qu’il les accepte. Il va venir lui-même dans un instant. Où pourrons-nous vous faire parvenir cette réponse ?

— Au café du Helder, si vous le voulez bien.

— Il est probable que, dans moins d’un quart d’heure, l’un de nous aura l’honneur de vous rejoindre.

— À bientôt alors, messieurs, termina M. Gilbert.

Après avoir salué les témoins de M. de Platen, l’officier entraîna M. de Cerny, à qui il dit, en franchissant le seuil du restaurant :

— J’avais hâte de sortir, car ces deux petits messieurs ne me vont pas du tout. On croirait vraiment qu’ils sont enchantés du duel de leur ami !

MM. Gilbert et de Cerny retrouvèrent au café du Helder MM. Dormeuil et de Serville qui les attendaient impatiemment ; ils leur communiquèrent les dispositions fâcheuses des témoins de M. de Platen, et moins d’une demi-heure s’était écoulée, que le chasseur du café Riche arrivait avec une lettre à l’adresse de M. Gilbert.

Celui-ci s’empressa de l’ouvrir.

Elle ne permettait plus de conserver aucun espoir.

« Monsieur, écrivait M. du Charmil, ainsi que nous le pensions, M. le comte de Platen ne croit pas de son honneur d’accepter les excuses de M. de Ferney. Les choses doivent suivre leur cours et notre rendez-vous reste fixé pour demain, à sept heures du matin, au pied du pont de Bougival, qui mène à l’île de Croissy. »

— C’est absurde ! s’écria M. Dormeuil, après avoir parcouru, lui-même ce billet, cette rencontre ne peut avoir lieu.

— Hélas ! mon cher maître, il n’y a plus rien à faire, observa M. de Serville, quoiqu’il soit bien probable que les témoins de M. Platen n’aient pas insisté beaucoup auprès de lui pour en terminer autrement que sur le terrain.

— Il est certain, dit M. Gilbert, que l’altitude de ces messieurs m’a fait une mauvaise impression. Tâchez donc, Cerny, de découvrir ce qu’ils sont et ce qu’ils font.

— Tout Paris sait qu’ils vivent à peu près aux crochets de M. de Platen, répondit