Page:Renan - Histoire des origines du christianisme - 2 Les Apotres, Levy, 1866.djvu/172

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veaux[1] était probablement cette espèce de sanglot sans notes distinctes, qui est encore le chant d’église des Grecs, des Maronites et en général des chrétiens d’Orient[2]. C’est moins une modulation musicale qu’une manière de forcer la voix et d’émettre par le nez une sorte de gémissement où toutes les inflexions se suivent avec rapidité. On exécute cette mélopée bizarre, debout, l’œil fixe, le front plissé, le sourcil froncé, avec un air d’effort. Le mot amen surtout se dit d’une voix chevrotante, avec tremblement. Ce mot jouait un grand rôle dans la liturgie. A l’imitation des Juifs[3], les nouveaux fidèles l’employaient pour marquer l’adhésion de la foule à la parole du prophète ou du préchantre[4]. On lui attribuait déjà peut-être des vertus secrètes, et on le prononçait avec une certaine emphase. Nous ignorons si ce chant ecclésiastique primitif était accompagné d’instruments[5]. Quant au chant intime, à

  1. Act., xvi, 25 ; I Cor., xiv, 15 ; Col., iii, 16 ; Eph., v, 19 ; Jac., v, 13.
  2. L’identité de ce chant chez des communautés religieuses séparées depuis les premiers siècles prouve qu’il est fort ancien.
  3. Num., v. 22 ; Deuter., xxvii, 15 et suiv. ; Ps. cvi, 48 ; I Paral., xvi, 36 ; Nehem., v, 13 ; viii, 6.
  4. I Cor., xiv, 16 ; Justin, Apol. I, 65, 67.
  5. I Cor., xiv, 7, 8, ne le prouve pas. L’emploi du verbe ψάλλω ne le prouve pas non plus. Ce verbe impliquait originairement