Page:Renan - Histoire des origines du christianisme - 2 Les Apotres, Levy, 1866.djvu/220

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fleur, avant que les difficultés intérieures l’eussent minée. Elle resta comme un rêve splendide, dont le souvenir anima dans leur vie d’épreuve tous ceux qui en avaient fait partie, comme un idéal auquel le christianisme aspirera sans cesse à revenir, sans y réussir jamais[1]. Ceux qui savent quel trésor inappréciable est pour les membres encore existants de l’Église saint-simonienne le souvenir de Ménilmontant, quelle amitié cela crée entre eux, quelle joie luit dans leurs yeux quand on en parle, comprendront le lien puissant qu’établit entre les nouveaux frères le fait d’avoir aimé, puis souffert ensemble. Les grandes vies ont presque toujours pour principe quelques mois durant lesquels on a senti Dieu, et dont le parfum suffit pour remplir des années entières de force et de suavité.

Le premier rôle, dans la persécution que nous venons de raconter, appartint à ce jeune Saül, que nous avons déjà trouvé contribuant, autant qu’il était en lui, au meurtre d’Étienne. Ce furieux, muni d’une permission des prêtres, entrait dans les maisons soupçonnées de renfermer des chrétiens, s’emparait violemment des hommes et des femmes, et les traînait en prison ou au tribunal[2]. Saül se vantait qu’aucun

  1. I Thess., ii, 14.
  2. Act., viii, 3 ; ix, 13, 14, 21, 26 ; xxii, 4, 19 ; xxvi, 9 et