Page:Renan - Histoire des origines du christianisme - 2 Les Apotres, Levy, 1866.djvu/63

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serait la peine la plus vive. J’en conclurais ou que mon esprit s’est laissé troubler dans sa libre et sereine allure, ou que quelque chose s’est appesanti en moi, puisque je ne suis plus capable de me contenter de la joyeuse contemplation de l’univers.

Qui ne voit, d’ailleurs, que, si mon but était de faire la guerre aux cultes établis, je devrais procéder d’une autre manière, m’attacher uniquement à montrer les impossibilités, les contradictions des textes et des dogmes tenus pour sacrés. Cette besogne fastidieuse a été faite mille fois et très-bien faite. En 1856[1], j’écrivais ce qui suit : « Je proteste une fois pour toutes contre la fausse interprétation qu’on donnerait à mes travaux, si l’on prenait comme des œuvres de polémique les divers essais sur l’histoire des religions que j’ai publiés, ou que je pourrai publier à l’avenir. Envisagés comme des œuvres de polémique, ces essais, je suis le premier à le reconnaître, seraient fort inhabiles. La polémique exige une stratégie à laquelle je suis étranger : il faut savoir choisir le côté faible de ses adversaires, s’y tenir, ne jamais toucher aux questions incertaines, se garder de toute concession, c’est-à-dire renoncer à ce qui fait l’essence même de l’esprit scientifique. Telle n’est pas ma méthode. La question fondamen-

  1. Préface des Études d’histoire religieuse.