Page:Renan - Histoire des origines du christianisme - 2 Les Apotres, Levy, 1866.djvu/83

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

elle, si c’est toi qui l’as pris, dis-moi où tu l’as posé, afin que je l’emporte. » Pour toute réponse, elle s’entend appeler par son nom : « Marie ! » C’était la voix qui tant de fois l’avait fait tressaillir. C’était l’accent de Jésus. « O mon maître !… » s’écrie-t-elle. Elle veut le toucher. Une sorte de mouvement instinctif la porte à baiser ses pieds[1]. La vision légère s’écarte et lui dit : « Ne me touche pas ! » Peu à peu l’ombre disparaît[2]. Mais le miracle de l’amour est accompli. Ce que Céphas n’a pu faire, Marie l’a fait : elle a su tirer la vie, la parole douce et pénétrante du tombeau vide. Il ne s’agit plus de conséquences à déduire, ni de conjectures à former. Marie a vu et entendu. La résurrection a son premier témoin immédiat.

Folle d’amour, ivre de joie, Marie rentra dans la ville, et aux premiers disciples qu’elle rencontra : « Je l’ai vu, il m’a parlé, » dit-elle[3]. Son imagination fortement troublée[4], ses discours entrecoupés et sans suite, la firent prendre par quelques-uns pour

  1. Matth., xxviii, 9, en observant que Matthieu, xxviii, 9-10, répond à Jean, xx, 16-17.
  2. Jean, xx, 11-17, en accord avec Marc, xvi, 9-10. Comparez le récit parallèle, mais bien moins satisfaisant de Matth., xxviii, 1-10 ; Luc, xxiv, 1-10.
  3. Jean, xx, 18.
  4. Comparez Marc, xvi, 9 ; Luc, viii, 2.