Page:Renan - Histoire des origines du christianisme - 3 Saint Paul, Levy, 1869.djvu/155

La bibliothèque libre.
Aller à la navigation Aller à la recherche
Cette page a été validée par deux contributeurs.

nature et les observances qui le surchargeaient ? Si le premier parti eût triomphé, comme le voulaient les schammaïtes, la propagande juive était chose finie. Il est bien certain que le monde ne se serait pas fait juif dans le sens étroit du mot. Ce qui composait l’attrait du judaïsme, ce n’étaient pas les rites, qui ne différaient pas en principe de ceux des autres religions, c’était sa simplicité théologique. On l’acceptait comme une sorte de déisme ou de philosophie religieuse ; et, en effet, dans la pensée d’un Philon par exemple, le judaïsme s’était très-bien associé aux spéculations philosophiques ; chez les esséniens, il avait revêtu la forme d’utopie sociale ; chez l’auteur du poëme attribué à Phocylide[1], il était devenu un simple catéchisme de bon sens et d’honnêteté ; chez l’auteur du traité « De l’empire de la raison[2] », une sorte de stoïcisme. Le judaïsme, comme toutes les religions fondées d’abord sur la caste et la tribu, était encombré de pratiques destinées à séparer le croyant du reste du monde. Ces pratiques n’étaient plus qu’un obstacle le jour où le judaïsme aspirait justement à devenir la religion universelle, sans exclusion ni séparation. C’est en tant que déisme, et

  1. Jacob Bernays, Ueber das phokylideische Gedicht ( Berlin, 1856).
  2. Parmi les œuvres de Josèphe.