Page:Renan - Histoire des origines du christianisme - 3 Saint Paul, Levy, 1869.djvu/163

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l’Église ; il avait formé des Églises de gentils ; Titus, son ami intime, n’était pas circoncis. L’Église de Jérusalem ne pouvait plus fermer les yeux sur des faits aussi notoires. En général, cette Église était, sur le point qui nous occupe, hésitante ou favorable au parti le plus arriéré. Le sénat conservateur était là. Voisins du temple, en contact perpétuel avec les pharisiens, les vieux apôtres, esprits étroits et timides, ne se prêtaient pas aux théories profondément révolutionnaires de Paul. Beaucoup de pharisiens, d’ailleurs, avaient embrassé le christianisme, sans renoncer aux principes essentiels de leur secte[1]. Pour de telles personnes, supposer qu’on pouvait être sauvé sans la circoncision était un blasphème. La Loi leur paraissait subsister dans son entier. On leur disait que Jésus était venu y mettre le sceau, non l’abroger. Le privilège des enfants d’Abraham leur paraissait intact ; les gentils ne pouvaient entrer dans le royaume de Dieu sans s’être préalablement affiliés à la famille d’Abraham ; avant d’être chrétien, en un mot, il fallait se faire juif. Jamais, on le voit, le christianisme n’eut à résoudre un doute plus fondamental. Si l’on eût voulu croire le parti juif, l’agape même, le repas en commun, eût été

  1. Act., xv, 5 ; xxi, 20.