Page:Renan - Histoire des origines du christianisme - 3 Saint Paul, Levy, 1869.djvu/200

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parlaient du mouvement qui grandissait sans cesse. Un petit groupe se forma. Tout ce monde sentait l’ail[1] ; ces ancêtres des prélats romains étaient de pauvres prolétaires, sales, sans distinction, sans manières, vêtus de fétides souquenilles, ayant l’haleine mauvaise des gens qui mangent mal[2]. Leurs réduits présentaient cette odeur de misère qu’exhalent des personnes vêtues et nourries grossièrement, réunies dans une chambre étroite[3]. On fut bientôt assez nombreux pour parler haut ; on prêcha dans le ghetto ; les juifs orthodoxes résistèrent. Que des scènes tumultueuses se soient produites alors, que ces scènes se soient renouvelées plusieurs soirs de suite, que la police romaine soit intervenue, que, peu soucieuse de savoir de quoi il s’agissait, elle ait adressé son rapport à l’autorité supérieure et mis les troubles sur le compte d’un certain Chrestus, dont on n’avait pu se saisir, que l’expulsion des agitateurs ait été décidée, il n’y a rien dans cela que de très-plausible. Le passage de Suétone et plus encore celui des Actes sembleraient impliquer que tous les juifs furent chassés à cette occasion ; mais cela n’est pas à sup-

  1. Fœtentes judæi. Ammien Marcellin, XXII, 5.
  2. Voir les Apôtres, p. 290 et suiv.
  3. Juvénal, iii, 14 ; Martial, IV, iv, 7.