Page:Renan - Histoire des origines du christianisme - 3 Saint Paul, Levy, 1869.djvu/241

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coup d’argent de cette ignoble exploitation. La pauvre fille, soit qu’elle eût vraiment l’esprit exalté, soit qu’elle fût lasse de son infime métier, n’eut pas plus tôt aperçu les missionnaires qu’elle se mit à les suivre avec de grands cris. Les fidèles prétendaient qu’elle rendait hommage à la foi nouvelle et à ceux qui la prêchaient. Cela se renouvela plusieurs fois. Un jour enfin, Paul l’exorcisa ; la fille, calmée, prétendit être délivrée de l’esprit qui l’obsédait. Mais le dépit de ses maîtres fut extrême ; par la guérison de la fille, ils perdaient leur gagne-pain. Ils intentèrent un procès à Paul, auteur de l’exorcisme, et à Silas, comme son complice[1], et les amenèrent à l’agora, devant les duumvirs[2].

Il eût été difficile de fonder une demande d’indemnité sur une raison aussi singulière. Les plaignants relevèrent surtout le fait de trouble causé dans la cité et de prédication illicite : « Ils prêchent des coutumes, disaient-ils, qu’il ne nous est pas permis de suivre, puisque nous sommes Romains. » La ville, en effet, était de droit italique, et la liberté des cultes devenait d’autant moindre que les personnes tenaient

  1. Timothée et Luc n’étaient sans doute pas présents à l’acte de l’exorcisme.
  2. C’était le nom qu’on donnait aux premiers magistrats des colonies.