Page:Renan - Histoire des origines du christianisme - 3 Saint Paul, Levy, 1869.djvu/396

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Toute une légende commença dès lors à se former contre Paul. On refusa de croire qu’un vrai juif eût pu commettre une noirceur comme celle dont on le trouvait coupable. On prétendit qu’il était né païen[1], qu’il s’était fait prosélyte. Et pourquoi ? La calomnie n’est jamais à court de raisons. Paul s’était fait circoncire, parce qu’il avait espéré d’épouser la fille du grand prêtre[2]. Le grand prêtre, en homme sage qu’il était, la lui ayant refusée, Paul, par dépit, se mit à déclamer contre la circoncision, le sabbat et la Loi[3]… Voilà la récompense qu’on obtient des fanatiques pour avoir servi leur cause autrement qu’ils ne l’entendent, disons mieux, pour avoir sauvé la cause qu’ils perdaient par leur esprit étroit et leurs folles exclusions.

Jacques, au contraire, devint pour le parti judéo-chrétien le chef de toute la chrétienté, l’évêque des évêques, le président de toutes les bonnes Églises, de celles que Dieu a vraiment fondées[4]. Ce fut probablement après sa mort que l’on créa pour lui ce rôle

  1. Allusion à ceci : Apoc., ii, 9 ; iii, 9. Cf. II Cor., xi, 22 ; Phil., iii, 5.
  2. Comp. Masséket Gérim, c. i (édit. Kirchheim).
  3. Epiph., hær. xxx, 16.
  4. Hégésippe dans Eus., H. E., II, 23 ; Lettre de Clément à Jacques, en tête des Homélies pseudo-clémentines, titre ; Épiph., hær. xxx, 16 ; lxxviii, 7.