Page:Renan - Histoire des origines du christianisme - 3 Saint Paul, Levy, 1869.djvu/415

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perdus de la Syrie. Paul, en revanche, sera presque désavoué. Son titre d’apôtre, nié par ses ennemis[1], sera faiblement défendu par ses amis[2]. Les Églises qui lui doivent le plus notoirement leur fondation voudront avoir été fondées par lui et par Pierre. L’Église de Corinthe, par exemple, fera les violences les plus flagrantes à l’histoire pour montrer qu’elle dut son origine à Pierre en même temps qu’à Paul[3]. La conversion des gentils passera pour l’œuvre collective des Douze[4] ; Papias, Polycrate, Justin, Hégésippe sembleront à dessein supprimer le rôle de Paul et presque ignorer son existence. C’est seulement quand l’idée d’un canon de nouvelles écritures sacrées se sera établie, que Paul reprendra son importance. Ses lettres alors sortiront en quelque sorte des archives des Églises pour devenir la base de la théologie chrétienne, qu’elles renouvelleront de siècle en siècle.

À la distance où nous sommes, la victoire de Paul nous fait l’effet d’avoir été complète. Paul nous

  1. Apoc., xxi, 14.
  2. C’est ce qui résulte du ton du livre des Actes. Voir les Apôtres, introd., p. iv-v.
  3. Denys de Corinthe, dans Eusèbe, Hist. eccl., II, 25.
  4. Justin, Apol. I, 39, 45 ; Dial. cum Tryph., 42, 53 ; Homél. pseudo-clém., iii, 59 ; Lettre de Clément à Jacques, en tête de ces Hom., §. 1. Comp. Act., x.