Page:Renan - Histoire des origines du christianisme - 3 Saint Paul, Levy, 1869.djvu/501

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même, elle est comme une musique indistincte ; on entend un son de flûte ou de cithare, mais on ne saisit pas le morceau que jouent ces instruments. C’est comme une trompette enrouée : elle a beau sonner ; comme elle ne dit rien de clair, personne n’obéit à ce signal incertain et ne se prépare au combat. Si la langue ne donne pas des sons nettement articulés, elle ne fait que frapper l’air ; un discours dans une langue qu’on ne comprend pas n’existe pas pour l’intelligence. Ainsi pas de glossolalie sans interprétation. Il y a plus, la glossolalie en elle-même est stérile ; l’intelligence avec elle reste sans fruit ; la prière a lieu en vous sans que vous y ayez part.

« Tu fais un hymne d’action de grâces par l’inspiration de l’Esprit, comment veux-tu que le peuple dise l’Amen, s’il ne sait pas ce que tu dis ? Ton hymne est peut-être très-beau ; mais les autres n’en sont pas édifiés. Pour moi, je remercie Dieu de parler plutôt la langue de vous tous. J’aime mieux dire dans l’église cinq paroles avec mon bon sens, pour instruire les autres, que dix mille paroles en langues étrangères[1]. Frères, ne soyez pas des enfants par le jugement ; soyez des enfants quand il s’agit du mal ; mais par le jugement

  1. Γλῶσσα pour les classiques désigne toujours un mot étrange ou étranger, un mot qui a besoin d’interprétation. Les « glossaires » sont des recueils de mots à expliquer.