Page:Renan - Histoire des origines du christianisme - 3 Saint Paul, Levy, 1869.djvu/575

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furent, en un sens, les semaines les mieux remplies de sa vie. Cet écrit devint plus tard le résumé du christianisme dogmatique, la déclaration de guerre de la théologie à la philosophie, la pièce capitale qui a porté toute une classe d’âpres esprits à embrasser le christianisme comme une manière de narguer la raison, en proclamant la sublimité et la crédibilité de l’absurde. C’est l’application des mérites de Christ qui justifie ; c’est Dieu qui opère en nous le vouloir et le faire[1]. Voilà le renversement de la raison, qui, essentiellement pélagienne, a pour dogme fondamental la liberté et la personnalité des mérites. Eh bien, la doctrine de Paul, opposée à tout sens humain, a été réellement libératrice et salutaire. Elle a séparé le christianisme du judaïsme ; elle a séparé le protestantisme du catholicisme. Les observances pieuses, persuadant au dévot que par elles il est justifié, ont un double inconvénient : d’abord, elles tuent la morale en faisant croire au dévot qu’il y a un moyen sûr et commode d’entrer en paradis malgré Dieu. Le juif le plus sec de cœur, un usurier égoïste et méchant, s’imaginait qu’en observant la

    ciellement sur II Cor., x, 14-16 ; Rom., xv, 19 ; II Tim., iv, 10. Mais cela ne lève aucune des difficultés qui s’opposent à l’admission de l’Épître à Tite.

  1. Phil., ii, 13.