Page:Renan - Histoire des origines du christianisme - 3 Saint Paul, Levy, 1869.djvu/98

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nir les murmures : on devient très-regardant sur les questions d’argent à force de vivre au milieu de gens qui y songent beaucoup. Partout où Paul faisait quelque séjour, il s’établissait et reprenait son métier de tapissier[1]. Sa vie extérieure ressemblait à celle d’un artisan qui fait son tour d’Europe, et sème autour de lui les idées dont il est pénétré.

Un tel genre de vie, devenu impossible dans nos sociétés modernes pour tout autre qu’un ouvrier, est facile dans les sociétés où, soit les confréries religieuses, soit les aristocraties commerciales constituent des espèces de franc-maçonneries. La vie des voyageurs arabes, d’Ibn-Batoutah par exemple, ressemble fort à celle que dut mener saint Paul. Ils circulaient d’un bout à l’autre du monde musulman, se fixant en chaque grande ville, y exerçant le métier de kadhi, de médecin, s’y mariant, trouvant partout un bon accueil et la possibilité de s’occuper. Benjamin de Tudèle et les autres voyageurs juifs du moyen âge eurent une existence analogue, allant de juiverie en juiverie, entrant tout de suite dans l’intimité de leur hôte. Ces juiveries étaient des quartiers distincts, fermés souvent par une porte, ayant un chef de reli-

  1. Act., xviii, 3 ; xx, 34 ; I Thess., ii, 9 ; II Thess., iii, 8 ; I Cor., iv, 12.