Page:Renan - Histoire des origines du christianisme - 4 Antechrist, Levy, 1873.djvu/262

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surtout aux deux apôtres Pierre et Paul, travail où les prétentions pieuses eurent beaucoup de part. Il n’est guère croyable que, dans les jours qui suivirent l’horrible carnage arrivé en août 64, on ait pu revendiquer les cadavres des suppliciés. Dans la masse hideuse de chair humaine pétrie, rôtie, piétinée, qui fut ce jour-là traînée au croc dans le spoliaire[1], puis jetée dans les puticuli[2], il eût peut-être été difficile de reconnaître l’identité de chacun des martyrs. Souvent sans doute on obtenait l’autorisation de retirer des mains des exécuteurs les restes des condamnés[3] ; mais, en supposant (ce qui est fort admissible) que des frères eussent bravé la mort

  1. Le hasard nous a conservé le nom du « curateur du spoliaire » qui probablement surveilla cette horrible opération. Il s’appelait Primitivus. Nous avons l’épitaphe du tombeau où il reposa en compagnie du laniste Claude, du rétiaire Télesphore et du médecin adjoint au ludus matutinus, Claude Agathocle. Tous ces personnages paraissent avoir été des esclaves ou affranchis de Néron (Orelli, no 2554). Le marbre impassible ajoute : Sit vobis terra levis. Nous avons l’épitaphe d’un autre medicus ludi matutini, Eutychus, qui fut aussi esclave de Néron, et de sa femme Irène (Orelli, no 2553). Il est remarquable que tous ces fonctionnaires de l’arène portent les mêmes noms que les chrétiens, sans doute parce qu’ils venaient en grand nombre de l’Asie.
  2. Συνηθροίσθη.
  3. Digeste, de Cadaveribus punitorum, XLVIII, xxiv, 1 et 3 ; Diocl. et Max., Cod. Just., constit. 11, de Religiosis et sumptibus funerum (III, xliv).