Page:Renan - Histoire des origines du christianisme - 4 Antechrist, Levy, 1873.djvu/383

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Néron pour modèle et de suivre ses maximes de gouvernement. Trente ou quarante ans après, tout le monde désirait qu’il fût encore vivant et souhaitait son retour[1].

Cette popularité, dont il n’y a pas trop lieu d’être surpris, eut, en effet, une singulière conséquence. Le bruit se répandit que l’objet de tant de regrets n’était pas réellement mort. Déjà du vivant de Néron, on avait vu poindre, dans l’entourage même de l’empereur, l’idée qu’il serait détrôné à Rome, mais qu’alors commencerait pour lui un nouveau règne, un règne oriental et presque messianique[2]. Le peuple a toujours de la peine à croire que les hommes qui ont occupé longtemps l’attention du monde sont définitivement disparus. La mort de Néron à la villa de Phaon, en présence d’un petit nombre de témoins[3], n’avait pas eu un caractère bien public ; tout ce qui concernait sa sépulture s’était passé entre trois femmes qui lui étaient dévouées ; Icélus presque seul avait vu le cadavre[4] ; il ne restait rien de sa

  1. Dion Chrysostome, Orat. xxi, 10 (édit. d’Emperius) : Ὅν γε καὶ νῦν ἔτι πάντες ἐπιθυμοῦσι ζῆν, οἱ δε πλεῖστοι καὶ οἴονται.
  2. Suétone, Néron, 40 ; cf. Tacite, Ann., XV, 36. Le faux Néron ne rêve que la Syrie et l’Égypte. Tacite, Hist., II, 9.
  3. Quatre, selon Suétone, Néron, 48-50.
  4. Plutarque, Vie de Galba, 7 ; Suétone, Nér., 49.