Page:Renan - Histoire des origines du christianisme - 4 Antechrist, Levy, 1873.djvu/403

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

l’an 59, enfin, il n’y a presque plus d’année qui ne soit marquée par quelque désastre[1]. La vallée du Lycus, en particulier, avec ses villes chrétiennes de Laodicée, de Colosses, fut abîmée en l’an 60[2]. Quand on songe que c’était là justement le centre des idées millénaires, le cœur des sept Églises, le berceau de l’Apocalypse, on se persuade qu’un lien étroit exista entre la révélation de Patmos et les bouleversements du globe ; si bien que c’est ici l’un des rares exemples qu’on peut citer d’une influence réciproque entre l’histoire matérielle de la planète et l’histoire du développement de l’esprit. L’impression des catastrophes de la vallée du Lycus se retrouve également dans les poëmes sibyllins[3]. Ces tremblements d’Asie répandaient partout l’effroi ; on en parlait dans le monde entier[4], et le nombre de ceux qui ne voyaient pas dans ces accidents les signes d’une divinité courroucée était bien peu considérable[5].

  1. Eusèbe, Chron., aux années 62 et 65 ; Suétone, Néron, 20 ; Philostrate, Apollonius, IV, 34 ; VI, 38, 41 ; Sénèque, Quæst. nat., VI, 1 ; Pline, Hist. nat., II, lxxxiii (85).
  2. Voir Saint Paul, p. 357-358, note, et ci-dessus, p. 99. Eusèbe et Orose se trompent sur la date de cet événement. Tacite, XIV, 27, tranche la question.
  3. Carmina sibyll., III, 471 et suiv. ; V, 286-291.
  4. Juvénal, vi, 411.
  5. Passages sibyllins précités ; Dion Cassius, LXVIII, 25.