Page:Renan - Histoire des origines du christianisme - 4 Antechrist, Levy, 1873.djvu/528

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Ce n’est que vers le XIIe siècle, quand le moyen âge s’enfonce dans la voie d’un rationalisme scolastique assez peu soucieux de la tradition des Pères, que le sens de la vision de Jean se trouve tout à fait compromis[1]. Joachim de Flore peut être considéré comme le premier qui transporta hardiment l’Apocalypse dans le champ de l’imagination sans limites, et chercha, sous les images bizarres d’un écrit de circonstance qui borne lui-même son horizon à trois ans et demi, le secret de l’avenir entier de l’humanité.

Les commentaires chimériques auxquels a donné lieu cette fausse idée ont jeté sur le livre un injuste discrédit. L’Apocalypse a repris de nos jours, grâce à une plus saine exégèse, la place élevée qui lui appartient dans les écritures sacrées. L’Apocalypse est, en un sens, le sceau de la prophétie, le dernier mot d’Israël. Qu’on lise dans les anciens prophètes, dans Joël par exemple[2], la description du « jour de Jéhovah », c’est-à-dire de ces grandes assises que le

    l’édition de Florez, qui se trouve à Paris, en possession de M. l’abbé Nolte, et sur deux importants manuscrits, dont l’un lui appartient. Des apocalypses figurées manuscrites et xylographiques (Paris, 1870), p. 3, 16-17, 24-25, 76-77. Édit. de Florez, p. 438, 498.

  1. Et encore il ne se perd pas entièrement. V. Hist. litt. de la Fr., t. XXV, p. 258.
  2. Joël, ii, 1 et suiv.