Page:Renan - Histoire des origines du christianisme - 4 Antechrist, Levy, 1873.djvu/57

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fut si peu répandu, durant les trois quarts de siècle qui suivirent sa composition. Il est probable que l’auteur, après l’an 70, voyant Jérusalem prise, les Flavius solidement établis, l’empire romain reconstitué, et le monde obstiné à durer, malgré le terme de trois ans et demi qu’il lui avait assigné, arrêta lui-même la publicité de son ouvrage. L’Apocalypse, en effet, n’atteignit toute son importance que vers le milieu du IIe siècle, quand le millénarisme devint un sujet de discorde dans l’Église, et surtout quand les persécutions redonnèrent aux invectives contre la Bête du sens et de l’à-propos[1]. La fortune de l’Apocalypse fut ainsi attachée aux alternatives de paix et d’épreuves que traversa l’Église. Chaque persécution lui donna une vogue nouvelle ; c’est quand les persécutions sont finies que le livre court de véritables dangers, et se voit sur le point d’être chassé du Canon, comme un pamphlet mensonger et séditieux.

Deux traditions dont j’ai admis en ce volume la plausibilité, savoir la venue de Pierre à Rome et le séjour de Jean à Éphèse, ayant donné lieu à de longues controverses, j’en ai fait l’objet d’un appendice à la fin du volume. J’ai en particulier discuté le

  1. Voir la lettre des Églises de Vienne et de Lyon, dans Eusèbe, H. E., V, i, 10, 58 (notez ἡ γραφή).