Page:Renan - Histoire des origines du christianisme - 4 Antechrist, Levy, 1873.djvu/583

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cours et les parvis. Un affreux carnage se faisait autour de l’autel, sorte de pyramide tronquée, surmontée d’une plate-forme, qui s’élevait devant le temple ; les cadavres de ceux qu’on tuait sur la plateforme roulaient sur les degrés et s’entassaient au pied. Des ruisseaux de sang coulaient de tous côtés ; on n’entendait que les cris perçants de ceux qu’on égorgeait et qui mouraient en adjurant le ciel. Il était temps encore de se réfugier dans la ville haute ; plusieurs aimèrent mieux se faire tuer, regardant comme un sort digne d’envie de mourir pour leur sanctuaire ; d’autres se jetaient dans les flammes ; d’autres se précipitaient sur les épées des Romains ; d’autres se perçaient eux-mêmes ou s’entre-tuaient[1]. Des prêtres qui avaient réussi à gagner la crête de la toiture du temple, arrachaient les pointes qui s’y trouvaient avec leurs scellements de plomb, et les lançaient sur les Romains ; ils continuèrent jusqu’au moment où la flamme les enveloppa. Un grand nombre de Juifs s’étaient assemblés autour du lieu saint, sur la parole d’un prophète qui leur avait assuré que c’était là le moment même où Dieu allait faire apparaître pour eux les marques du salut[2]. Une galerie où s’étaient retirés six mille de ces malheureux (presque

  1. Dion Cassius, LXVI, 6.
  2. Jos., B. J., VI, v, 2.