Page:Renan - Histoire des origines du christianisme - 5 Evangiles, Levy, 1877.djvu/114

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

suistes des gens qui ne servaient qu’à damner plus de monde, en exagérant les obligations au delà de ce que l’homme peut porter[1]. Le judaïsme ayant pour base ce fait, prétendu expérimental, que l’homme est traité ici-bas selon ses mérites, portait à juger sans cesse, puisque l’équité des voies de Dieu ne se démontrait qu’à cette condition. Le pharisaïsme a déjà dans la théorie des amis de Job et de certains psalmistes[2] des racines profondes. Jésus, en rejetant l’application de la justice de Dieu à l’avenir, rendait inutiles ces critiques inquiètes de la conduite d’autrui. Le royaume des cieux réparera tout ; Dieu jusque-là sommeille ; mais fiez-vous à lui. Par horreur de l’hypocrisie, le christianisme arriva même à ce paradoxe de préférer le monde franchement vicieux, mais susceptible de conversion, à une bourgeoisie faisant parade de son apparente honnêteté. Beaucoup de traits de la légende conçus ou développés sous l’influence de Jésus furent de cette idée.

Entre gens de même race, partageant le même exil, admettant les mêmes révélations divines et ne différant que sur un seul point d’histoire récente, les controverses étaient inévitables. On en trouve

  1. Matth., xxiii, 4, 15.
  2. Voir, en particulier, le Ps. lxxiii, surtout le v. 12.