Page:Renan - Histoire des origines du christianisme - 5 Evangiles, Levy, 1877.djvu/523

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toutes les affaires où j’ai des doutes. Qui, en effet, peut mieux que vous diriger mes hésitations ou instruire mon ignorance ? Je n’ai jamais assisté à aucun procès contre les chrétiens ; aussi ne sais-je ce qu’il faut punir ou rechercher, ni jusqu’à quel point il faut aller. Par exemple, je ne sais s’il faut distinguer les âges ou bien si, en pareille matière, il n’y a pas de différence à faire entre la plus tendre jeunesse et l’âge mûr, s’il faut pardonner au repentir ou si celui qui a été tout à fait chrétien ne doit bénéficier en rien d’avoir cessé de l’être, si c’est le nom lui-même, abstraction faite de tout crime, ou les crimes inséparables du nom que l’on punit[1]. En attendant, voici la règle que j’ai suivie envers ceux qui m’ont été déférés comme chrétiens. Je leur ai posé la question s’ils étaient chrétiens ; ceux qui l’ont avoué, je les ai interrogés une seconde, une troisième fois, en les menaçant du supplice ; ceux qui ont persisté, je les ai fait conduire à la mort ; un point, en effet, hors de doute pour moi, c’est que, quelle que fût la nature délictueuse ou non du fait avoué, cet entêtement, cette inflexible obstination méritaient d’être punis. Il y a eu quelques autres malheureux atteints de la même folie que, vu leur titre de citoyens romains, j’ai marqués pour être renvoyés à Rome. Puis, dans le courant de la procédure, le crime, comme il arrive d’ordinaire, prenant de grandes ramifications, plusieurs espèces se sont présentées. Un libelle anonyme a été déposé, contenant beaucoup de

  1. Comp. Justin, Apol. I, 4, 7 ; Apol. II, init. ; Athénagore, Leg., 3 ; Tertullien, Apol., 2, 3 ; Ad nat., I, 3 (nomen in causa est).