Page:Renan - Histoire des origines du christianisme - 6 Eglise chretienne, Levy, 1879.djvu/307

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l’organisation sociale. À vrai dire, ces parties défectueuses étaient susceptibles d’être corrigées. La porte était ouverte à tous les progrès. La philosophie stoïcienne pénétrait la législation, y introduisait l’idée des droits de l’homme, de l’égalité civile, de l’uniformité d’administration provinciale. Les privilèges de l’aristocratie romaine disparaissaient de jour en jour. Les chefs de la société croyaient au progrès, y travaillaient. C’étaient des philosophes, des philanthropes, voulant sans utopie la plus grande application possible de la raison aux choses humaines. Cela valait bien mieux que la fanatique et inapplicable Thora, bonne tout au plus pour un très-petit peuple. On avait lieu d’être content de vivre, et, derrière cette belle génération d’hommes d’État, on en apercevait une autre plus sage, plus sérieuse, plus honnête encore.

Adrien s’amusait, et il en avait le droit. Son esprit curieux et actif rêvait toutes les chimères à la fois ; mais son jugement n’était pas assez sûr pour le préserver des fautes de goût. Il faisait construire, au pied des montagnes de Tibur, une villa qui était comme l’album de ses voyages et le pandæmonium de la célébrité. On eût dit la foire bruyante et un peu heurtée d’un monde près de mourir. Tout y était : du faux égyptien, du faux grec, le Lycée, l’Académie, le